Dans la Section 2.2, vous avez fait connaissance avec Greta sur l’île des Délices et Carlos sur l’île du Bonheur, qui produisent et consomment tous les deux des pommes et du blé. Il est avantageux pour chacun d’eux de se spécialiser parce que leur productivité diffère. Dans cette section, nous nous intéresserons aux effets que cette spécialisation induit sur les prix des biens échangés.
Supposons que Carlos peut produire au cours d’une année 3 tonnes de blé ou 1,5 tonnes de pommes. Puisqu’il faut la même quantité de facteurs de production (terre et travail) pour produire 3 tonnes de blé que pour produire 1,5 tonnes de pommes, chaque tonne de blé coûte autant que 0,5 tonne de pommes (1,5/3). Ainsi, le prix relatif du blé par rapport aux pommes est de 0,5, c’est-à-dire que la tonne de blé vaut 500 kg de pommes sur l’île du Bonheur.
Greta, quant à elle, peut produire 3 tonnes de pommes par an ou 1,5 tonnes de blé. Le prix relatif du blé par rapport aux pommes sur l’île des Délices est donc de 2 (3/1,5).
L’île du Bonheur a donc un avantage comparatif dans la production du blé. Rappelez-vous les acquis de la Section 2.2 : une économie a un avantage comparatif dans la production d’un bien lorsqu’il est relativement moins coûteux dans cette économie (en l’absence de commerce).
Le prix relatif des pommes est simplement l’inverse du prix relatif du blé, donc si l’île du Bonheur a un avantage comparatif dans la production du blé, l’île des Délices aura un avantage comparatif dans la production de pommes. Le Tableau 2.14 synthétise les chiffres clés de cet exemple. Les prix relatifs du bien dans lequel chaque île a un avantage comparatif sont indiqués en gras.
Supposons à présent qu’il n’existe pas de coûts à l’échange (transport gratuit, absence de droits de douane) : les pommes et le blé s’échangent alors sur un seul marché unifiant les deux îles ; le prix relatif du blé et des pommes deviendra donc le même dans les deux îles. Quel sera le nouveau prix ?
En cas de commerce entre ces îles, les prix se situeront donc à un niveau intermédiaire des prix des deux économies quand elles étaient en autarcie (entre 0,5 et 2).
Si Greta était la seule équipée d’une barque pour établir ce commerce, elle pourrait négocier ses pommes le plus cher possible sans que Carlos ne puisse se rendre sur l’île des Délices et voir qu’il en coûte sur place seulement 0,5 tonne de blé pour une tonne de pommes. Greta dispose donc d’un pouvoir de marché ; pour augmenter ses gains à l’échange, elle choisira un prix supérieur à 0,5. Cependant, si elle atteignait un prix de 2 tonnes de blé par tonne de pommes, elle éliminerait complètement les gains à l’échange de Carlos. À ce prix, Carlos aurait tout intérêt à produire ses pommes lui-même plutôt que les acheter à Greta. Un raisonnement identique aboutirait à un résultat symétrique si Carlos était le seul à disposer d’une barque. Les nouveaux prix s’établissent donc entre ces deux extrêmes (< 2 et > 0,5) et se rapprochent d’un pays à l’autre ; les prix des biens importés baissent dans tous les cas.
Si, contrairement à notre hypothèse, les échanges entre deux marchés nationaux sont coûteux du fait du fret, des tarifs douaniers ou d’autres coûts, les prix relatifs auront moins tendance à se rapprocher d’un pays à l’autre.
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